Cité d’Ivoire
Son précédent roman, « Le chant des glaces », fortement documenté sur le plan scientifique, est absolument passionnant ! Avec « Cité d’Ivoire », Jean Krug emmène le lecteur à Iliane, une des villes dômes co-administrée par des intelligences artificielles, où les humains se sont réfugiés après cinq cents ans de réchauffement climatique. Des hommes se révoltent « Que vous allez flinguer l’embrasement ? Vous pigez pas que c’est trop tard ? » lance un manifestant à la brigade. Dan veut convaincre Sam, son frère, de venir à une réunion pour que des milliers d’Ilians puissent s’en sortir. « À part un petit millier d’ultrariches, c’est la même galère pour tout le monde ». Au centre de la brigade, Maëlle Swann, une policière, n’en peut plus, elle est à bout ! On fait bien sentir au Kid, jeune anarchiste, qu’il fait partie du niveau zéro et qu’en échange de sa liberté, il devra leur donner des renseignements. Il retrouve son sous-sol que « les bourges qualifient de dépotoir… conséquence d’une lutte déclenchée par leur putain soif de pouvoir ». Il est prêt à le défendre, doit-il pour un temps courber l’échine « pour mieux redresser mon squelette ». Sam se rend compte que ce que les médias et la mairie avaient proclamé « l’extérieur est dangereux » est complètement faux. Pour lui, il faut réunir tous ceux qui galèrent. Le lecteur suit avec beaucoup d’intérêt l’évolution de Sam, personnage essentiel car il apporte un regard neuf sur la vision du conflit et les agissements de tous ceux qui rêvent de liberté et ont besoin de bouffées d’air frais pour survivre. Plein de questions se posent. « Pourquoi ne pas lutter contre les injustices du système plutôt que de s’en accommoder ? Quelle forme de violence adopter ? Le Passeur tient un discours et leur montre un objet interdit, un livre « La Cité d’Ivoire» qui prouve l’existence d’une ville à l’extérieur, « une cité juste, libre… un lieu pour devenir plutôt qu’être… une piste de liberté pour les Ilians ». Jean Krug plonge le lecteur dans les arcanes d’une société pilotée par l’intelligence artificielle où peu à peu des habitants prennent conscience de leur aliénation et des mensonges proférés comme celui expliqué par Maîa, la scientifique, l’installation du dôme pour protéger des pluies acides. Ils veulent entrer dans la lutte contre ce pouvoir démesuré. La construction du récit, donner la parole, à tour de rôle, aux différents personnages, chacun avec sa propre personnalité et sa façon de s’exprimer par exemple le Kid : « Moi, le nerveux, le bouffre-gauffre qui monte à la cogne » bien différente de celle de Maëlle «Selon les réglementations en vigueur, les fléchettes doivent être utilisées avec parcimonie », fait vivre de l’intérieur et en profondeur cette lutte pour la liberté. Sont-ils prêts à tout tenter pour remplir leur mission ? Maëlle, la policière, au fil de ses découvertes, va réaliser ce qui se passe et complètement évolué. Les crieurs vont vivre des événements très violents. Vont-ils avoir assez de forces pour ne jamais s’avouer vaincus, « crever ou s’avilir » ? Vont-ils pouvoir atteindre « La cité obscure » ? Ce roman de science et d’anticipation captivant est un témoignage sur le futur qui pourrait arriver suite aux conséquences du réchauffement climatique et une mise en garde sur les dangers encourus par les hommes dans une société dirigée, à tous les niveaux, par l’intelligence artificielle.