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Faire l’amour comme une orchidée. Autobiographie d’une fleur extraordinaire

« Je suis le végétal qui, plus que n’importe quel autre, a offert aux hommes un bien précieux… la beauté ». Ainsi se présente l’« orchidée » cette fleur qui prend la parole tout au long de cet ouvrage. Les Astéracées vivent au sol alors que moi je suis dans les forêts et dans les branches des arbres. Je fais partie aujourd’hui des espèces en voie d’extinction. Qu’est-ce qui me distingue? « C’est ma façon d’aimer. Ma symbiose est totale et hyperspécialisée avec les animaux et les champignons ». Savez-vous que je suis « hermaphrodite ? ». De cette manière d’aimer en symbiose découle toutes mes qualités et mes ingénieuses inventions pour attirer les pollinisateurs. Charles Darwin nous a célébrées dans son ouvrage sur les orchidées. Il est le premier scientifique à nous avoir observées si attentivement ! A la fin de son introduction, notre orchidée conclue en annonçant qu’elle va raconter l’histoire de sa famille depuis les débuts. Au fil de l’ouvrage, de très beaux dessins d’orchidées illustrent les exemples cités. Les premiers chapitres sont consacrés à cette histoire, paléobotanique, Confucius, culture chinoise, Grèce Antique dont un des célèbres penseurs, Théophraste, fut le père du mot « orchidée », utilisation de mes tubercules à des fins médicinales, mystère des graines dévoilé… Il y a toujours eu de grands collectionneurs ! Il fallut attendre que le transport des orchidées tropicales et les serres soient au point pour que se constituent les premières collections. Le duc Cavendish en constitua une majestueuse et Paxton fut un jardinier-architecte renommé. Quels ont été les chasseurs d’orchidées qui se sont rendus célèbres ?Au XIX° siècle, après des tas d’aventures, Roezl, Pragois, partit pour l’Amérique latine d’où il envoya son premier chargement : deux mille orchidées en Europe puis vingt-sept mille plantes en Angleterre. Un autre grand botaniste-explorateur fut Jean Linden, Belge. Un taxinomiste d’exception fit un ouvrage comportant les nouvelles espèces que Linden avait découvertes. Des pépinières spécialisées naquirent, la plus célèbre fut créée par Frederick Sander. Trois histoires d’orchidées sont révélatrices de son esprit marketing. Connaissez-vous l’histoire de l’exquise vanille dont le premier à en parler fut Hernan Cortès en 1520 ? C’est sur l’île de la Réunion qu’un jeune esclave, Edmond,pour la première fois, pollinisa deux fleurs et le résultat fut spectaculaire. Darwin apporta une révolution, il fit de la botanique une vraie science en publiant son livre sur les orchidées. « L’étude des merveilleux dispositifs et stratagèmes dont les orchidées sont équipées, pourrait faire concevoir à certains une idée plus élevée de tout le règne végétal ». A travers une seule famille, il explique ce qu’est la fécondation croisée par les insectes, montrant ainsi le parallélisme entre le règne animal et le règne végétal. La structure insolite des orchidées est décrite avec un croquis : sépale, pollinies, rostellum, stigmate, éperon, ovaire, labelle… Darwin émit l’hypothèse qu’il devait exister un pollinisateur ayant une trompe de 20 centimètres pour pouvoir saisit tout le nectar au fond de l’éperon de cette taille d’une orchidée de Madagascar. Effectivement, après sa mort, on trouva une phalène ayant la trompe « prédite par Darwin ! Les œuvres littéraires faisant référence à des orchidées sont nombreuses. George Wells a consacré, en 1899, un ouvrage à une orchidée vampire. Trois observateurs différents constatèrent que les orchidées étaient des séductrices : un juge colonial français en Algérie, Maurice-Alexandre Pouyanne, le colonel John Godfrey, un militaire anglais vivant en France et Edith Coleman, enseignante en Australie, dont la petite fille l’interrogeait sur les frémissements des guêpes quand elles entrent dans une orchidée ? Edith comprit qu’elles étaient attirées par leur parfum, que le labelle leur rappelle l’aspect des guêpes femelles et qu’il s’agissait vraiment d’un acte « sexuel ». Proust également parle d’orchidée comme un bien précieux a exhiber dans « Du côté de chez Swann ». Elles sont associées au crime dans les romans de Chandler et de John Hadley Chase ainsi que dans de nombreux films. Le retour à la science se fit par une publication « L’intelligence des fleurs » de Maurice Maeterlinck et les œuvres de deux important orchidologues, Joseh Arditi et Robert Dressler qui publia en 1981 une véritable « bible » puis en 1993 une classification des orchidées. Il reste encore des centaines d’orchidées à découvrir. Beaucoup d’espoir puisque pour beaucoup de botanistes, elles sont « des espèces de sentinelles des milieux ambiants ». En fin d’ouvrage, un glossaire d’Anthère à Viscidarium. Dans cet ouvrage, Alessandro Wagner aborde l’histoire botanique de l’orchidée, avec ses grands collectionneurs et scientifiques, et décrit « ses merveilleux dispositifs et stratagèmes » dont celui de « faire l’amour ». Passionnant !

Alessandro Wagner, Arthaud

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